L’accord sur la sécurisation de l’emploi vise à sécuriser le CDI en perte de vitesse face au CDD. Mais sera-ce suffisant pour le contrat à durée indéterminée qui représente moins d’un contrat signé sur quatre aujourd’hui ?
« Pour lutter contre la précarité, l’économie française doit donner une préférence collective au CDI », a commenté le ministère du Travailaprès la signature le 11 janvier dernier par les partenaires sociaux de l’accord sur la sécurisation de l’emploi. Présenté en Conseil des ministres le 6 marsavant sa discussion par l’Assemblée nationale en avril, le texte devenu projet de loi maintient entre autres dispositions les deux statuts de CDD et CDI. Mais il alourdit le coût des CDD les plus courts et introduit plus de flexibilité dans les CDI avec notamment des cotisations réduites pour l’embauche de jeunes salariés.
Ces dispositions ont permis à la CFDT, à la CFE-CGC et à la CFTC de trouver un terrain d’entente avec le patronat, qualifiant l’accord d’équilibré alors que FO et la CGT ont refusé de le ratifier.
Mais cela suffira-t-il pour relancer le contrat à durée indéterminée ? Face aux embauches temporaires, il ne cesse de perdre du terrain. En 2011, sur 20,7 millions d’embauches hors intérim enregistrées, 84 % ont été des CDD et à peine 16 % concernent des CDI, note l’Acoss, l’organisme collecteur des cotisations Urssaf.La proportion pour les CDI est encore plus faible si l’on intègre les 18,6 millions d’embauches en mission d’intérim.
Moins de mobilité, plus de précarité
Certes dans les entreprises, on compte encore 84 % de salariés en CDI, qui rechignent à toute mobilité, de crainte de ne pouvoir retrouver un emploi avec un statut identique. Pour les autres, on note de nombreuses situations où les salariés disposent de plusieurs contrats simultanément (multi-activité), ou consécutivement dans une ou plusieurs entreprises au cours de la même année, lorsque les CDD se succèdent. « Ainsi, près d’un salarié sur cinq a eu au moins deux employeurs au cours de l’année », note l’organisme.
La tendance se prolonge dans le même sens. Pour le seul troisième trimestre 2012, les CDD ont représenté près de 82 % des contrats signésdans les entreprises de plus de 10 salariés, alors que cette proportion ne dépassait pas 67 % en 2000 et 70 % en 2007. Le CDI perd inexorablement du terrain.
Cette situation est le résultat de la crise et du manque de visibilité des entreprises sur leurs portefeuilles de commandes et leur plan de charge, ce qui ne les incite guère à proposer des emplois stables. Mais la précarité s’accentue, d’autant que les CDD eux-mêmes sont de plus en plus courts.
Par exemple, sur le quatrième trimestre 2012, alors que le nombre d’embauches en CDI reculait de 10,5 % par rapport à la fin 2011, le nombre de CDD de plus d’un mois baissait également de 3,4 %.Seul le nombre de CDD de moins d’un mois augmentait, de 7,7 %. Une bonne moitié des contrats à durée déterminée ne porteraient plus aujourd’hui que sur une semaine.
Globalement, c’est dans l’industrie que les embauches à plus d’un mois se sont le plus contractées, les entreprises de plus 20 salariés étant, sur l’ensemble des secteurs d’activité, les plus concernées. La précarité des emplois à durée limitée vient noircir le tableau déjà sombre du marché de l’emploi avec un chômage qui, touchant 3,17 millions de personnes sans aucun emploi en France métropolitaine, a progressé de 10,7 % en un an.
Plus de flexibilité pour mieux sécuriser ?
L’évolution du contrat de travail avec la flexibilitéintroduite dans l’accord pour la sécurisation de l’emploi a pour objectif d’infléchir la tendance et relancer le CDI. Le débat ouvert sur l’avenir du contrat à durée indéterminée montre que les Français y sont attachés : selon un sondage BVAréalisé en début d’année, 72 % des personnes interrogées sont contre la suppression du CDI.
Pas étonnant : dans la mesure où l’obtention d’un crédit bancaire ou l’accès à un logement en location dépend de la situation professionnelle du demandeur, un travail en CDI est souvent le sésame nécessaire pour faire aboutir une démarche. Le problème, alors, ne consiste pas seulement à remettre en question le CDI, mais tout l’environnement qui réclame un contrat de travail de cette nature.
Les entreprises qui réclamaient un élargissement du recours au contrat de mission et au contrat intermittent modifieront-elles leurs arbitrages entre CDI et CDD du fait des assouplissements introduits dans l’accord de janvier ? Les éléments de flexibilité sont bien réels. Mais les contrats à durée déterminée leur permettent d’adapter facilement leurs effectifs à leurs plans de charge. Les dispositions prises pour renchérir le coût des contrats les plus courts, qui ont été acceptées par le Medef, peuvent les inciter à opter pour des périodes de travail plus longues, sans revenir pour autant aux CDI.
Il faudra de toute façon le retour de la croissance et la capacité de disposer d’une vision de l’activité sur plus long terme pour analyser le comportement des entreprises en matière d’embauches. Dans l’immédiat, même l’intérim continue de plonger : il affichait fin janvier un recul de 10,3 %sur une année.
Gilles Bridier – Slate.fr
« Pour lutter contre la précarité, l’économie française doit donner une préférence collective au CDI », a commenté le ministère du Travailaprès la signature le 11 janvier dernier par les partenaires sociaux de l’accord sur la sécurisation de l’emploi. Présenté en Conseil des ministres le 6 marsavant sa discussion par l’Assemblée nationale en avril, le texte devenu projet de loi maintient entre autres dispositions les deux statuts de CDD et CDI. Mais il alourdit le coût des CDD les plus courts et introduit plus de flexibilité dans les CDI avec notamment des cotisations réduites pour l’embauche de jeunes salariés.
Ces dispositions ont permis à la CFDT, à la CFE-CGC et à la CFTC de trouver un terrain d’entente avec le patronat, qualifiant l’accord d’équilibré alors que FO et la CGT ont refusé de le ratifier.
Mais cela suffira-t-il pour relancer le contrat à durée indéterminée ? Face aux embauches temporaires, il ne cesse de perdre du terrain. En 2011, sur 20,7 millions d’embauches hors intérim enregistrées, 84 % ont été des CDD et à peine 16 % concernent des CDI, note l’Acoss, l’organisme collecteur des cotisations Urssaf.La proportion pour les CDI est encore plus faible si l’on intègre les 18,6 millions d’embauches en mission d’intérim.
Moins de mobilité, plus de précarité
Certes dans les entreprises, on compte encore 84 % de salariés en CDI, qui rechignent à toute mobilité, de crainte de ne pouvoir retrouver un emploi avec un statut identique. Pour les autres, on note de nombreuses situations où les salariés disposent de plusieurs contrats simultanément (multi-activité), ou consécutivement dans une ou plusieurs entreprises au cours de la même année, lorsque les CDD se succèdent. « Ainsi, près d’un salarié sur cinq a eu au moins deux employeurs au cours de l’année », note l’organisme.
La tendance se prolonge dans le même sens. Pour le seul troisième trimestre 2012, les CDD ont représenté près de 82 % des contrats signésdans les entreprises de plus de 10 salariés, alors que cette proportion ne dépassait pas 67 % en 2000 et 70 % en 2007. Le CDI perd inexorablement du terrain.
Cette situation est le résultat de la crise et du manque de visibilité des entreprises sur leurs portefeuilles de commandes et leur plan de charge, ce qui ne les incite guère à proposer des emplois stables. Mais la précarité s’accentue, d’autant que les CDD eux-mêmes sont de plus en plus courts.
Par exemple, sur le quatrième trimestre 2012, alors que le nombre d’embauches en CDI reculait de 10,5 % par rapport à la fin 2011, le nombre de CDD de plus d’un mois baissait également de 3,4 %.Seul le nombre de CDD de moins d’un mois augmentait, de 7,7 %. Une bonne moitié des contrats à durée déterminée ne porteraient plus aujourd’hui que sur une semaine.
Globalement, c’est dans l’industrie que les embauches à plus d’un mois se sont le plus contractées, les entreprises de plus 20 salariés étant, sur l’ensemble des secteurs d’activité, les plus concernées. La précarité des emplois à durée limitée vient noircir le tableau déjà sombre du marché de l’emploi avec un chômage qui, touchant 3,17 millions de personnes sans aucun emploi en France métropolitaine, a progressé de 10,7 % en un an.
Plus de flexibilité pour mieux sécuriser ?
L’évolution du contrat de travail avec la flexibilitéintroduite dans l’accord pour la sécurisation de l’emploi a pour objectif d’infléchir la tendance et relancer le CDI. Le débat ouvert sur l’avenir du contrat à durée indéterminée montre que les Français y sont attachés : selon un sondage BVAréalisé en début d’année, 72 % des personnes interrogées sont contre la suppression du CDI.
Pas étonnant : dans la mesure où l’obtention d’un crédit bancaire ou l’accès à un logement en location dépend de la situation professionnelle du demandeur, un travail en CDI est souvent le sésame nécessaire pour faire aboutir une démarche. Le problème, alors, ne consiste pas seulement à remettre en question le CDI, mais tout l’environnement qui réclame un contrat de travail de cette nature.
Les entreprises qui réclamaient un élargissement du recours au contrat de mission et au contrat intermittent modifieront-elles leurs arbitrages entre CDI et CDD du fait des assouplissements introduits dans l’accord de janvier ? Les éléments de flexibilité sont bien réels. Mais les contrats à durée déterminée leur permettent d’adapter facilement leurs effectifs à leurs plans de charge. Les dispositions prises pour renchérir le coût des contrats les plus courts, qui ont été acceptées par le Medef, peuvent les inciter à opter pour des périodes de travail plus longues, sans revenir pour autant aux CDI.
Il faudra de toute façon le retour de la croissance et la capacité de disposer d’une vision de l’activité sur plus long terme pour analyser le comportement des entreprises en matière d’embauches. Dans l’immédiat, même l’intérim continue de plonger : il affichait fin janvier un recul de 10,3 %sur une année.
Gilles Bridier – Slate.fr
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